Les MOTS du PLATEAU

La pince à linge...
est l'accessoire le plus utilisé par l'électricien de plateau. Exclusivement en bois, pour éviter la fonte de ses homologues en plastique, et la chauffe brûlante des pinces en métal, comme les pinces à dessin, la pince à linge permet de fixer sur les volets des projecteurs, les feuilles de gélatines (filtres colorés), les diffusions ou encore le ciné-feuille (cinéfoil ®) : aluminium noir.

Le choix des pinces à linge se fait sur la bonne fixation du ressort reliant les deux parties de bois et sur la taille de l'écartement possible. Les mauvaises pinces sont celles qui ne s'ouvrent pas assez et dont le ressort mal fixé laisse la pince se séparer en 3 morceaux trop facilement. Généralement en bois de bouleau, la bonne pince à linge, bien adaptée au travail du tournage, est bien souvent fabriquée en Italie. Elle peut servir d'isolant pour rectifier le réglage d'un volet bien chaud. Dans les règles de l'art, pour fixer une gélatine ou une diffusion sur les volets d'un projecteur avec des pinces à linge, celles-ci ne doivent pas être placées en avant, mais au contraire par l'arrière des volets pour permettre, si nécessaire, de jouer sur l'écartement des volets sans produire des plis ou une double couche devant le faisceau.

Des dizaines de pinces à linge sont achetées pour chaque film. Les électros les fixent souvent à leurs vêtements pour en avoir sous la main à tout moment. Parfois on sépare volontairement le ressort des 2 parties en bois, pour se servir de l'une d'elles comme "mini cale sifflet", utile pour caler une porte, par exemple. Une vieille tradition (perdue), voulait que le chef électro (et lui seul), fixe une pince à linge par heure supplémentaire effectuée, bien en évidence sur sa chemise ou sa veste.

Une histoire vraie : Au début des années 60, Loulou Baudier, électro, travaillait parfois, pour ce qui ne s'appelait pas encore la S.F.P. aux studios de Saint-Maurice ou de Joinville, donc pour la Télévision française. Il passait ainsi l'hiver au chaud, comme il le disait lui-même, avant de "ressortir" aux beaux jours sur des longs métrages. Un sorte d'hibernation d'électro ! L'état, propriétaire des lieux, envisageait la reprise en main technocratique des affaires, en ces lieux historiques du cinéma français. La tâche très officielle fût confiée à une batterie de polytechniciens et autres énarques, par le pouvoir gaulliste. Leur mission était essentiellement de contrôler minutieusement ces repaires de syndicalistes et de cocos qui se disaient travailleurs du film ! L'opération lancée, loupe en main, les technocrates du pouvoir épluchèrent une à une toutes les factures des studios, et particulièrement celles des fournitures achetées pour le travail de ces révolutionnaires en puissance ! Méticuleusement, chaque ligne de chiffre était reprise, dans l'espoir de trouver de scandaleux abus imputés à ces ouvriers bolchéviques, nommés électriciens et machinistes. Tous ces commis scrupuleux de l'état, bien ignorants des us et coutumes du métier, ne tardèrent pas à rédiger une note de service comminatoire et indignée, pour sommer les dits ouvriers de cesser de faire payer à la République, les pinces à linge de leurs femmes ! Et leur demander de rembourser cet évident abus de biens sociaux... !

(Témoignage de Michel Baudier, fils de Louis qui lui avait raconté cette histoire).


La pince à linge...
est aussi le titre d'une chanson des 4 Barbus, sur une musique de Beethoven, et des paroles de Pierre Dac et Francis Blanche.